Les origines du Border collie
Le Border Collie est un chien de troupeaux né et développé en Grande Bretagne. Son histoire révèle le travail de sélection majestueux accompli par les éleveurs britanniques à partir des races comme le Bearded Collie, le Rough Collie en y ajoutant une pointe de Gordon et de Pointer. De ces alliances naquit la race que nous connaissons aujourd'hui, un chien aux facultés incroyables et très intelligent. D'abord chien de troupeau, la race conquérit les autres disciplines canines où elle se montre particulièrement efficace.
Des origines incertaines
L'émergence de la race
Les 4 types de Border Collie
La reconnaissance du Border Collie
Le Border Collie en France
L'avenir de la race en plein débat
Des origines incertaines
Les documents permettant de retracer la naissance de la race sont rares. Aucune preuve concrète ne nous permet de définir avec exactitude les souches qui ont été apportées pour arriver à la race d'aujourd'hui. Du moins pas dans ses débuts. Toutefois, en 1790, Bedwick grave un chien de troupeau ressemblant à un mélange entre le Rough collie ( Colley à poils longs) et le Border Collie.(1) En effet, les tâches blanches présentes sur les pattes et le poitrail ainsi que la longueur du poil nous laisse penser à un apport de Colley, tandis que le reste de la robe principalement de couleur noir suppose les débuts du Border Collie. Bien entendue, tout ça n'est que théories basées sur les caractéristiques morphologiques de l'animal dessiné. Mais ce dessin apporte, à lui tout seul, une information capitale, notamment que nous sommes sûrs qu'à cette époque, les chiens de troupeau existaient en Angleterre et plus précisément sur ses frontières. La question intéressante à se poser, c'est comment sont arrivés les chiens de berger ?
L'histoire révèle que durant le Ie siècle des chiens de troupeaux, à l'allure plus lourde et plus massive que le berger de Bedwick, ont été importé en Irlande sous l'appellation de "Stumpi Tail Collies" et en Écosse sous l'appellation de "Stumpi Tail Beardie" accompagné par les moutons Mérinos. À cette époque, on ne cherchait pas à faire de sélection à proprement parler, les hommes se contentaient d'améliorer les performances de l'animal dans son travail et encore. Aussi, les croisements s'effectuaient surtout avec les chiens disponibles sur place, quand ce n'était pas accidentel.
Plus tard, le chien a joué, dans l'économie des Highlands and Islands, un rôle probablement similaire à celui qui fut le sien pendant des siècles en Europe continentale : ainsi, mis à part certain rôles anecdotiques, il fut gardien des troupeaux contre les prédateurs en tout genre, ainsi que des habitations, et un efficace auxiliaire de chasse. Succédant à la période clanique, qui s'acheva en 1746, une transformation du paysage social et économique des Highlands eut de lourdes conséquences sur l'environnement : les vallées et les plateaux se désertifièrent en terme de population humaine et devinrent « terres à moutons » puis à cerfs. C'est dans ce contexte qu'émergea le Border Collie.(2) Dans le sens où ce sont des conséquences qui ont poussé à la sélection d'un chien de berger plus adapté aux paysages.
Mais ce n'est que dans le courant du XVIIIe siècle que les Anglais vont s'intéresser de plus en plus prés à la sélection des chiens - et plus précisément sous le règne de la reine Victoria. À ce moment-là, on remarque la présence des ancêtres du Bobtail et du Bearded Collie, mais aussi du Wesh Collie Blue merle, qui d'après certains cynophiles seraient à l'origine de la robe merle et des yeux vairons du Border Collie. D'autres encore évoquent le Hillman Gallois, dont on dit qu'il est le père des Colley ainsi que le "Black and Tan" Collie présent dans le Pays de Galle. Rien ne permet de dire que tous ces chiens n'ont pas à un moment donné marqué le Border Collie.
L'émergence de la race
En 1860, les passionnés des chiens de troupeau vont créer le "Show Collies" et le "Working Collies". Les plus beaux sujets seront classés dans la première catégorie, pour être vendu à des citadins, tandis que les autres seront positionnés dans la seconde catégorie, destinés à être perfectionné pour le travail. C'est dans cette période que l'on va améliorer les aptitudes des "collies" avec l'infusion du Gordon et du Pointer.(3) De ces alliances naîtront des chiots dotés d'un meilleur odorat et d'un instinct de chasse plus poussé.
Ces activités canines sont appréciées par le grand public et dès 1873, on assiste à un premier concours, organisé à Bala sur les terres du Loyd Price. C'est dans ces concours que se joue l'avenir des chiens, c'est là que l'on convient d'un achat ou d'une saillie avec les plus beaux sujets. Pour la petite anecdote, en France, le premier concours similaire ne verra le jour, à Chartres, qu'en 1896, soit plus de 23 ans après ! Autant dire que les Anglais avaient déjà de l'avance sur le reste de l'Europe dans le domaine canin. Ainsi, le concours de Bala lance le début d'un gros travail de sélection que feront les fermiers, éleveurs ou amateurs dans le but de remporter la victoire. Car si ce premier concours n'a accueilli que 10 chiens et 300 spectateurs (ce qui est déjà conséquent), très vite l'idée va se populariser. Au point qu'en 1889, c'est la reine Victoria, elle-même, qui se déplace à un de ces concours organisés sur Llangolen. Là, encouragé par l'aristocratie, ces événements vont devenir une institution nationale accueillant chaque année de plus en plus de monde, y compris des pays voisins.
Aparté : il est bon de noter que la reine Victoria peut être estimée comme la mère des chiens en tout genre, même si elle avait une nette préférence pour les chiens d'agrément comme le Carlin, elle a agi et est intervenue à plusieurs reprises pour leur bien-être, comme par exemple l'interdiction de la coupe des oreilles. Alors que de nombreux rois ou présidents d'aujourd'hui se parade avec des chiens "pour faire bien", la reine Victoria, elle, aimait réellement être en leur compagnie. Aussi, son déplacement à l'un de ces concours n'est qu'une preuve de plus de son amour pour les poilus.
Ainsi à partir des années 1890, les sélections s'intensifient sur des chiens de plus en plus homogènes d'une vallée à l'autre, tous issus des géniteurs sortant victorieux des concours. Naturellement, on arrive très vite à un premier résultat avec la naissance d'Old-Hemp 9 en 1893. Ce chien sera considéré comme le père des border collie et fixera la race en transmettant ses qualités à ses quelque deux cents descendants ! Produit par M. Adam Telfer, fils de Roy (noir et feu) et Meg (noire), il était réputé pour être un étalon exemplaire aux facultés remarquables. Si bien qu'en l'espace de cinquante ans, 29 de ses descendants sont devenus des champions suprêmes, dont certains remportant plusieurs prix. Parmi eux, on cite les plus connus notamment Kep 13 (1908), Sweep 21 (1910 et 1912), Don 17 (1911 et 1914), Roy 1665 (1934, 1936 et 1937) et Glen 3940 (1946 et 1948).(5)
Les 4 types de Border Collie
En juillet 1906, des bergers et éleveurs fondent l'International Sheepdog Society (ISDS), avec à leur actif le père et le fils Telfer ( producteur de Old Hemp-9), Adam (producteur de Sweep 21 et Haig), Walter (producteur de Midge 152 et Queen 533) et Wilson reconnu pour être l'un des plus grand conducteur de troupeau avec un son actif un prodigieux palmarès ( 9 fois champion suprême avec six chiens différents, 11 fois champions d'Ecosse, 6 fois vainqueur de l'International Famer's championship, 2 fois vainqueur de l'international Brace championship et enfin 6 fois gagnant du Scottish Brace championship, avec parmi ses chiens, Roy 1665). (3) Et en 1908 sera mis en place la Stub Book Border, correspondant au livre généalogique du Border Collie.
En raison des différences de relief entre les plaines anglaises et les Highlands écossais, les agriculteurs ont élevé différence race de mouton en rapport avec leur localité. Le type de mouton ainsi que la topographie environnante ont conduit à des attributs physiques différents sur les chiens de troupeaux. Pour pouvoir les rendre plus efficace, les agriculteurs et éleveurs ont adapté la morphologie des chiens en fonction de leur région de travail. Ainsi pour survivre dans les collines rugueuses et les montagnes escarpées, les moutons devaient être légers et rapides. Ainsi dans ces conditions, les chiens ont tendance à être hauts sur patte avec un petit corps. En revanche, dans les plaines, on y trouve des moutons plus lourds et plus lent, pour y faire face, les chiens doivent être plus robustes et avoir un centre de gravité plus bas.
C'est pourquoi, on distingue 4 types de Border Collie - selon la classification de Sheila Grew. Le premier est le type Northumbrian qui correspond ni plus ni moins à la morphologie d'Old Hemp-9 qui est né dans la région de Northumbrie en Angleterre. Ces types ont tendance à être de taille moyenne avec un pelage rugueux et très peu de blanc. Le second type correspond aux chiens issus de la lignée de Cap, produit par Wilson. Ils ont les poils durs, sont plutôt haut sur patte et on remarque la présence des taches blanches en plus grande quantité, notamment un collier plus grand, descendant sur les pattes. Le type Nap, qui provient de la génération des chiens issus de Whitehope Nap. Ils sont particulièrement forts, rapides et puissants. Leurs poils sont courts muni d'une sous-couche épaisse, ils sont grands avec un corps plus petit leur donnant une apparence plus carrée que les autres types. Ce type-là est particulièrement apprécié par les Américains, car plus adapté à leur environnement. Enfin le dernier type Herdman's Tommy est issu de Roy, père d'Old Hemp, arrière-grand-père de Tommy, appartenant à Isaac Herdman. Ces chiens sont noirs, blancs et feus comme Brocken Robbie appartenant à Barbara Carpenter.
Après la Première Guerre mondiale, un nouveau secrétaire sera nommé au sein de l'ISDS, A. Reid, qui imposera la dénomination officielle de Border Collie. Les activités prendront de l'ampleur, de plus en plus de monde s'inscrivent au concours motivé par l'espoir de remporter et de faire reconnaître le chien au plus grand nombre - et ainsi le faire reproduire. C'est d'ailleurs par l'intermédiaire de ces concours qu'auront lieu les premiers importations / exportation à l'étranger, principalement en Australie et en Nouvelle-Zelande. Durant la Seconde Guerre mondiale, les activités sont ralentie puis reprises sans rencontrer de difficulté particulière et en 1965 l'Irlande rejoint à la société.
La reconnaissance du Border Collie
En 1972, sous l'égide de Barbara Carpenter sera crée le Border Collie Club of Great Britain. Ce club aura pour principale vocation de faire reconnaître la race en tant que Border Collie par l'Américan Kennel Club et d'encourager la production de la race au sein du pays. Barbara Carpenter est considérée comme étant la doyenne des handlers et est à l'origine d'une grande et belle lignée de Border Collie, les Brocken, où Brocken correspond au nom de son premier Border Collie.
Outre Barbara Carpenter, il n'est pas possible de ne pas parler d'un autre personnage très important dans l'histoire de la race : Sheila Grew - déjà évoqué un peu plus haut. Sheila est née en 1918, et a fait des études de médecine. Elle consacra la première partie de sa vie à soigner ses clients dans un hôpital de Londres. Après la guerre elle rejoint l'association "Save the Children" destiné à sauver les enfants dans la misère la plus totale. C'est donc une personne humaine et entière, qui s'investit pour les autres. Mais dans les années 60, en raison de l'invalidité de son bras, elle décide de changer de carrière pour se lancer dans l'agriculture. Là, elle fera la connaissance du Border Collie, qui sera désormais la mission de sa vie.
Elle va apprendre à connaître la race, et diffuser par ailleurs un bouquin destiné à apprendre aux débutants à comprendre la race et savoir l'utiliser correctement. Plus tard, malgré de faible économie, elle va tout mettre en œuvre pour réaliser un périodique destiné à la race, le "Working Sheepdog New" qui existe encore aujourd'hui. En parallèle, elle s'occupera de sa lignée Gaerwen, issue du nom de sa ferme, et prendra le temps de les éduquer et les former chaque jour malgré un handicap de plus en plus présent. Sheila Grew est considérée comme le pionner de la race et consacra une très grande partie de son existence à la faire connaître à un plus grand nombre.
Ainsi lorsque Barbara Carpenter se place à la tête du club, elle reprend le flambeau et poursuit le même objectif. Après acharnement, l'AKC fini par accepter officiellement la race en 1976 et en 1988 sera écrit le premier standard de la race. Standard qui pose problème à de nombreux britanniques qui considèrent, à juste titre, que la morphologie n'est pas caractéristique du Border Collie. Pour eux, un border, c'est avant tout une façon de faire, une méthode, une allure et une attitude face au mouton, avec son œil perçant presque hypnotisant pour conduire les bétails en douceur à l'endroit voulu. La particularité du border, outre l'aspect de sa robe, sa taille ou sa longueur, résulte dans l'instinct naturel, l'art et le savoir-faire au travail sur troupeau.
Le Border Collie en France
En France, le premier Border Collie a été officiellement importé en 1966 par M. de Flombelle, directeur de l'Alliance pastoral, dans la région de Montmorillon. Le chien déjà dressé y fera ses premières démonstrations, quelques années plus tard. Impressionné de nombreux éleveurs de mouton comme Henri de La Celle et Paul de Monvallier vont très vite acquérir la race. C'est ainsi que l'histoire du Border Collie démarre dans notre pays. Néanmoins, il faudra attendre 1972 pour que la race commence à se populariser, grâce à Michel Sailleau, conseiller d'élevage de l'Alliance pastoral qui ramènera 8 chiots lors d'un échange scolaire entre les écoles bergères françaises et anglaises.
En 1975, Sailleau et La Celle, fondent l' "association des éleveurs et utilisateurs de chien de berger de race du centre-ouest" qui a pour but de contrôler les importations de Border et de promouvoir la race dans la région, tout en mettant en place une sorte de livre des origines ou seront répertorié les chiens homologués, notés sous forme d'étoile. Le succès et la notoriété de l'association est tel qu'en 1979, elle dépasse allégrement la région du centre-ouest. En conséquence, des problèmes internes apparaissent notamment un désaccord sur le devenir de l'association et de la race. Ainsi, l'association se divise avec d'un côté ceux qui adhèrent au fait que les activités doivent rester régionales, sans être limité à la seule race du Border Collie, et cette dernière ne doit être réservé qu'au berger. De l'autre côté, ceux qui ne sont pas d'accord, fondent l "Association Française du Border Collie" avec à sa tête La Celle, qui sera le soutien non-négligeable, du ministère de l'Agriculture et de la société centrale canine.
La très grande raréfaction de la main-d'œuvre spécialisée oblige aujourd'hui un grand nombre d'éleveurs de moutons à réaliser eux-mêmes les diverses manipulations nécessaires sur un troupeau : changements de parcs, tris d'animaux, soins collectifs ou individuels. Le très bon chien de race bergère, bien dressé et bien utilisé, devient à nouveau l'auxiliaire indispensable qui économise du temps et de la peine. D'où la recrudescence d'intérêt pour la présence sur l'exploitation d'un bon chien de berger, et par voie de conséquence pour les Journées de démonstration, les Sessions de formation et les Concours sur troupeau que l'on observe depuis quatre ou cinq ans. L'invasion, le mot n'est pas trop fort, de la race Border Collie en France découle de cette nécessité. À titre d'exemple, les concours réalisés en 1980 font état d'une participation moyenne de : 25 % de Beaucerons, 25 % de Bergers des Pyrénées et 50 % de Border Collies.(6)
Avec une telle popularité, la race prend de plus en plus de places et très vite on constate la présence de trois types, ceux qui sont importés dressés, ceux qui sont nés en Grande Bretagne mais dressé en France, et les derniers considérés comme des chiens d'agréament (en faible pourcentage). Mais ce qui a d'effrayant dans l'analyse, c'est que l'association se rend vite compte d'un dressage catastrophique mener par les Français sur la race. La plupart d'entre eux croient qu'elle s'éduquer naturellement et s'imaginent que le chien apprend tout seul. Plus grave encore, rien n'est fait pour apprendre aux éleveurs à perpétuer toutes les facultés de la race à travers les sélections. Ce qui pourrait dégénérer et donner des chiens de moins bonne qualité au travail. M. La Celle va rapidement comprendre l'erreur et tout remettre en cause pour réorganiser l'association en fixant de nouveaux objectifs à travers les rassemblements, les démonstrations et les concours, ce qui portera ses fruits. Et pour parfaire l'ensemble, en 1983, le TAN (Test d'Aptitude Naturelle) devient obligatoire pour la confirmation de toute inscription au LOF à titre initial.
L'avenir de la race en plein débat
Dès 1985, la SCC reproche le manque de participation du Border Collie au concours d'exposition. Ce à quoi, le président de l'association confirmait que ses chiens n'étaient pas élevés ou sélectionnés pour être dans les rings de beauté. Mais le succès de la race est tel qu'elle ne pouvait pas passer au travers d'un autre public de plus en plus intéressé. Ainsi, le Border Collie est largement utilisé dans les sports canins où il remporte des places confortables sans difficulté. Aujourd'hui, la question se pose de savoir si la race doit devenir un chien de canapé ou non. C'est l'actuel grand débat, quelles seront les conséquences sur son devenir, ses facultés, son intelligence ou sa renommée ?
1- Natural History - Bedwick
2- Entre chien et loup, au temps des clans des highlands d'écosse - Denis-Richard Blackbourn - 1981
3- Le Border Collie - Pierre Legatte - 1997
4- Key Dogs from the Border Collie Family - Sheila Grew - 1985
5- Pedigree database
6- Ethnozootechnie - 1981